Purée Divine : Le Billet de Gaby Nasr

Joyeux anniversaire, les cocus ! Souvenez-vous : la guerre de juillet 2006 nous avait ramenés 30 ans en arrière. Mais n’est-elle pas belle, la vie ? Une année est passée déjà, ce qui fait qu’il ne nous reste plus que 29 autres seulement à rattraper. On dit merci qui ? Merci le Hezbollah, bien sûr, dont le patron goûte depuis douze mois maintenant aux délices de la vie souterraine.Alors à partir de là, bien sûr, plus rien n’empêche de festoyer. Roupie de sansonnet, que ces mille morts aplatis sous les bombes ; fiente de moineau, que ces 3 000 blessés, handicapés à vie pour certains ; et crotte de bique, que le million de déplacés, forcés de tendre la main pour retaper un abri de fortune en attendant la prochaine victoire divine. Encore une ou deux prouesses comme celle-là, et les Libanais se retrouveront à poil en train de quémander le droit d’hébergement dans des camps de réfugiés en Palestine.Mais l’essentiel est ailleurs : l’honneur et l’orgueil sont saufs. Le truc avait déjà réussi à Nasser en 1967, puis à Saddam Hussein en 1991, qui étaient tous deux imberbes. Pourquoi ne réussirait-il pas aux barbus ? Et allons-y pour le raisonnement par l’absurde : le Hezbollah a gagné la guerre non pas en raison de victoires engrangées sur le terrain, mais parce qu’Israël a été incapable de l’anéantir. Une nuance à déguster finement. En somme, on s’est pris une dérouillée mémorable, nos ponts ont été pulvérisés, nos routes défoncées, nos villages transformés en parking, les Hébreux nous ont enfoncés à plus de 30 kilomètres… Mais nous avons quand même gagné parce que le Chef est toujours chef et qu'il est toujours à la barre. Sacré Nasrallah ! S’il a pu faire avaler ce boa constrictor à ses ouailles, il n’aura aucun mal à les mener jusqu’à la libération de Vladivostok. Il a d’ailleurs déjà fait breveter son concept de la vie active d’un être humain : 20 ans d’intifada, 20 ans de résistance, 20 ans de libération. Bien sûr, cela vaut tous les diplômes et à 60 ans passés, le militant loyal pourra toujours claper sa purée, le regard attendri porté sur ses roquettes. « Je pense, donc je suis… Je suis, donc Dieu existe. » Descartes peut aller se rhabiller !

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